La carence en fer et l’anémie ferriprive sont des causes importantes de maladies et de handicaps dans le monde entier, ce qui en fait l’un des principaux problèmes de santé publique dans le monde.
La supplémentation en fer par voie orale ou intraveineuse pour corriger l’anémie ferriprive étant liée à des effets secondaires très dangereux, il est fortement recommandé de se tourner vers une stratégie nutritionnelle naturelle pour reconstituer les réserves de fer et normaliser les concentrations d’hémoglobine.
Fer héminique ou le fer non héminique ?
Sans aucun doute, les produits animaux fournissent un fer abondant et très assimilable, dit héminique, dans la viande, la volaille, le poisson et les fruits de mer. Ce fer était donc fortement recommandé depuis des décennies pour corriger rapidement une anémie ferriprive.
Cependant, en 2015, le Centre international de recherche sur le cancer classait la consommation de viande transformée comme cancérogène et la viande rouge comme probablement cancérogène chez l’homme.
Pourquoi ? La principale raison, mais la plus grave, qui explique cette classification, est que le fer héminique joue, entre autres, un rôle crucial dans la promotion de la cancérogénèse colorectale.
C’est incontournable, trop de fer est dangereux, et par voie de conséquence, une consommation trop importante de produits animaux, et donc de fer héminique, ainsi que de suppléments ferriques, n’est plus à recommander.
C’est ainsi que maintenant, pour reconstituer les réserves de fer, on préconise plutôt une approche naturelle de l’anémie, en augmentant l’apport en fer à partir d’aliments riches en fer non héminique — efficace, mais moins assimilable — et donc présentant peu de risque d’un excès ferrique. Ces aliments sont les fruits, les légumes, les noix, les graines, les céréales complètes et les légumineuses.
Éviter les inhibiteurs de l’absorption du fer
Que le fer soit héminique (produits carnés) ou non héminique (produits végétaux), son absorption est entravée par certains aliments.
1. Il faut éviter d’associer un produit laitier (LAIT, FROMAGES) à un aliment qui permet des apports de fer : lentilles, tofu, houmous, etc. pour les végétariens, mais aussi à la viande rouge pour les omnivores. La consommation de produits laitiers dans un repas végétal ou animal réduit la biodisponibilité du fer.
2. Outre le calcium du lait, les autres inhibiteurs ou répresseurs d’absorption du fer sont les TANINS du thé, du café, du cacao. Les POLYPHÉNOLS du vin rouge sont aussi des inhibiteurs du fer. La recommandation générale est de ne pas prendre ces boissons aux repas.
3. Certains médicaments inhibent l’absorption du fer : des antibiotiques, les antiacides (inhibiteur de la pompe à protons (IPP), les médicaments pour l’ostéoporose, l’aspirine, entre autres.
Miser sur les optimiseurs de l’absorption du fer
1. La VITAMINE C est obligatoire pour une absorption optimale du fer dans les repas. En fait, la vitamine C multiplie par trois l’absorption du fer végétal. La cuisine méditerranéenne, qui comporte très peu de produits laitiers, mais qui utilise en abondance le jus de citron frais dans, et sûr, ses mets, est à adopter. Pensez à l’houmous, cette recette millénaire de purée de pois chiches et sésame, avec jus de citron obligatoire !
2. Le TREMPAGE des légumineuses riches en fer non héminique est une vieille tradition des peuples qui consomment des légumineuses. On peut changer l’eau une ou deux fois. Cuire avec un filet de jus de citron, puis avant de servir, arroser avec du jus de citron, par ailleurs un excellent rehausseur de goût. Ne pas oublier de garnir avec du persil finement ciselé, une excellente source de fer aussi.
3. LES PRODUITS LACTOFERMENTÉS, la fermentation lactique des légumes permet de réduire leur teneur en phytates qui ont la mauvaise réputation d’empêcher la bonne assimilation de certains minéraux dont le fer. Méthode ancestrale de conservation des aliments tirés frais du potager, la lactofermentation est recommandée dans l’anémie ferriprive. En fait, les aliments acidifiés comme le pain intégral au LEVAIN, les sauces tomate préparées dans des casseroles de fonte sont aussi des aliments traditionnels de la cuisine méditerranéenne qui protègent de l’anémie ferriprive. Alors, faites figurer régulièrement à vos menus de la choucroute, du miso, du tamari, du tempeh, etc.
Les aliments riches en fer non héminique
Le fer non héminique est abondant dans un grand nombre de végétaux dont les céréales (pain au levain, maïs éclaté, etc.), les légumineuses (houmous, tofu, etc.), les noix (pistache, cajou, etc.), les graines (sésame noir, graines de citrouille, etc.), les légumes verts (poivrons verts, chou à feuilles, etc.), les fruits frais et secs (abricots séchés, raisins secs, figues noires et blanches, etc.), sans oublier les fines herbes (persil, thym, basilic, menthe, etc.)
Les quelques végétaux mentionnés ci-après sont des sources à privilégier en cas d’anémie ferriprive.
La BETTERAVE (Beta vulgaris) contient du fer, des nitrates, du sodium, du potassium et de la bétalaïne. Parmi les bienfaits de la betterave sous forme de jus, on peut citer le traitement de l’anémie, car le jus de betterave améliore la capacité des globules rouges à transporter l’oxygène, la réduction de la pression artérielle en dilatant les vaisseaux sanguins et en relaxant les muscles lisses, la prévention des malformations congénitales en augmentant les niveaux de folate (acide folique ou vitamine B9).
Les recettes de betteraves en salade (avec jus de citron), de soupe (le bortsch slave), et sous forme de poudre additionnée aux pains, biscuits, gâteaux, et boissons, ont toutes données, et cela, depuis des siècles, de bons résultats dans l’anémie ferriprive.
Le GINGEMBRE (Zingiber officinale) peut compléter une thérapie ferrique orale dans le traitement et la prévention de l’anémie ferriprive. La supplémentation en gingembre améliore l’absorption du fer et donc l’efficacité de la thérapie ferrique orale. Le gingembre réduit également le stress oxydatif et il protège ainsi contre l’excès de fer libre, soit non lié à des protéines. Les polyphénols biactifs du gingembre agissent comme des prébiotiques pour le microbiote intestinal. Il favorise ainsi la santé de l’intestin et réduit les effets secondaires indésirables des comprimés de fer.
LA GRENADE (Punica granatum) en jus est riche en vitamine C et une étude in vitro a démontré une action très positive dans l’amélioration de l’absorption et de l’assimilation du fer. Selon ses auteurs, cette étude apporte une solution simple au problème mondial de l’anémie ferriprive. L’action synergique de plusieurs substances phytochimiques, en plus de l’acide ascorbique, dans le jus de grenade peut être responsable de l’amélioration de la biodisponibilité du fer.
LE SÉSAME (Sesamum indicum) riche en fer aide à traiter l’anémie. Le sésame noir, particulièrement, et le sésame brun non décortiqué contribuent à la production d’hémoglobine, d’hématocrite et de globules rouges dans l’organisme. Sous forme de beurre (tahini), de farine (graines moulues dans un moulin à café électrique), et ajouté entier aux pains, biscuits, salades, le sésame est une bombe nutritionnelle à ne pas négliger. On doit dire la même chose de la graine de CITROUILLE. Dans les magasins bio, on trouve un tofu de graines de citrouille (eau et graines de citrouille exclusivement) délicieux et riche en fer et en protéines.
La MÉLASSE VERTE (Blackstrap), à ne pas confondre avec la mélasse de fantaisie, est une excellente source de fer très assimilable. Une cuillère à soupe de mélasse verte procure environ 3,6 mg de fer non héminique. Bien des mamans enceintes et allaitantes ont retrouvé rapidement leur courage et leur énergie en buvant, à la place de café ou de thé, une mélasse chaude préparée ainsi : une cuillère à soupe de mélasse verte dans une tasse d’eau bouillante avec une cuillère à dessert de crème de coco ou du lait d’avoine, et un filet de sirop d’érable.
Conclusion
Le fer est un nutriment indispensable à la vie. Sa carence entraîne une anémie ferriprive, qui touche actuellement environ 1,2 milliard de personnes dans le monde, dont 41,7 % d’enfants (de moins de 5 ans), 40,1 % de femmes enceintes et 32,5 % de femmes non enceintes.
L’anémie n’est pas banale. En l’absence d’une prise en charge efficace, l’anémie peut entraîner une diminution des capacités cognitives, un affaiblissement du système immunitaire et une augmentation de la mortalité.
Pour contrer les effets très délétères de l’excès de fer et de la supplémentation en fer, l’utilisation thérapeutique des produits à base de plantes (fruits, légumes, céréales complètes, légumineuses, noix, graines) devient plus courante dans la pratique clinique actuelle.
Faisons notre part pour éradiquer l’anémie ferriprive dans le monde.
Références :
● Coralia Cotoraci, et coll., Natural Antioxidants in Anemia Treatment, Int J Mol Sci. 2021.
● Philippe Cayot, Le fer dans les aliments, la lutte contre le déficit de fer, Open Science, 2022.
● Soo Liang Ooi et coll., Polyphenol-Rich Ginger ( Zingiber officinale) for Iron Deficiency Anaemia and Other Clinical Entities Associated with Altered Iron Metabolism, Molecules, 2022.
● S. P. Balasubramani et coll., Pomegranate Juice Enhances Iron Dialysability and Assimilation in In-Vitro Cell Free and Cell-Based Models, Plant Foods Hum Nutr, 2020.
● Fereidoon Shahidi et coll., Antioxidant activity of white and black sesame seeds and their hull fractions, 2006.